Mauvais pied

C’est étrange de réaliser qu’elle est toujours là ; cinq ans plus tard elle guète encore l’ouverture, l’occasion de sortir de l’ombre toutes griffes dehors.

Matin. Le cliquetis des griffes du chien résonne dans la cuisine. Vieille est la bête, vieux sont les muscles de sa vessie… si je ne me lève pas rapidement - je le sais - il me faudra éponger. De bon matin… effet bonne humeur garanti !

Pourtant, je ne me lève pas. L’autre capte mon attention beaucoup plus efficacement. A mesure que mon corps se réveille, le bas de mon dos s’engourdit ; on dirait qu’il rouille… ça a commencé comme ça la dernière fois… le stress me gagne.

Non, tu ne poseras pas tes valises !


Assise devant mon bol de tisane, j’observe le petit cachet jaunâtre et sa forme de demi-lune. Je vais être dans le gaz toute la journée avec ça… c’est de ma faute aussi ! Ça fait combien de temps que je n’ai plus fait mes exercices ? Un bon mois. Une éternité.

Le cachet passe de la main à la bouche. Verre d’eau. Avale. Dans un quart d’heure, le coton envahira mon corps, ma tête, mes idées…

Allongée, la tête enfouie sous ma couette, les idées se bousculent. Est-ce que ça suffira à la faire fuir ? Est-ce que j’en ai pris assez ? Est-ce je vais pouvoir faire autre chose que rien aujourd’hui ? Une seule chose me paraît clair : le rapel à l’odre est efficace ! Mes exercices vont retrouver leur place dans mon emploi du temps rapidement. A la vitesse de l’éclair. Aujourd’hui même.

No Web Land

Non je suis pas accro ! J’arrête quand je veux…

Quatre jours déjà qu’Internet ne fonctionne plus. Sur la box, le petit voyant clignote, rouge, toujours.

Le premier jour, j’en ai profité pour faire le ménage : la vaisselle qui m’attendait depuis plusieurs jours au fond de l’évier, le panier à linge qui débordait, la poubelle à vider - il était temps ! - le balaie à passer … ça n’a pas été si propre depuis longtemps ici ! À la fin de la journée, dans cette maison qui sent le frais, je me sens bien, déconnectée.

Deuxième jour. Toujours la loupiote rouge… il me reste bien le four à décrasser, le congélateur à dégivrer… ras-le-bol du ménage ! Alors, un œil rivé sur le point rouge, je me mets aux fourneaux. Ça occupe. Mais c’est pas mon truc. D’habitude, je préfère regarder l’Homme cuisiner ; surtout parce que ça se voit qu’il s’amuse quand il coupe, teste associations et cuissons… de temps en temps il râle un peu, surtout quand il n’obtient pas ce qu’il avait en tête… mais en vrai, je le sais, il s’amuse… un peu comme un gosse avec sa pâte à modeler. Mais moi, non. Devant les fourneaux, je m’ennuie, je décroche. Très vite, les mains dans la pâte à tarte, mon esprit divague vers mon dernier texte en cours d’écriture, vers comment ça serait vachement plus drôle de s’envoyer en l’air, vers cet ennui mortel qui me pousse à cuisiner !

Troisième jour. « C’est la ligne », qu’elle dit l’opératrice. Elle envoie un technicien… mais nous sommes déjà vendredi alors ce sera pas avant la semaine prochaine. Pour contrer l’ennui, je mange. Sans faim. Juste pour me vider les nerfs. Ça ne marche pas vraiment bien sûr…

Quatrième jour. M’en fous… j’reste au lit ! Rien à faire de toutes façons. L’Homme est au boulot, les copines sont en mode “week-end en couple”, la maison est propre, j’ai lu tous mes livres, même ma musique est sur Internet… Pfff ! Si au moins j’avais du fric à claquer dans une salle d’escalade ou dans un week-end à la mer… Je pourrais aller courir aussi… je pourrais…

Ce matin-là, je ne le sais pas encore, mais il me reste encore deux jours à tirer.

Ça gratte !

Je ne sais pas qui est le responsable de ça… mais si j’le chope…

C’est hallucinant c’que ça gratte !

Je crois bien que j’ai passé la nuit à me gratter le ventre. Dans la journée, j’arrive un peu à me contenir, mais pas trop quand même… très classe la fille.

Et plus j’y touche, plus ça gratte !

On voit pas trop sur la photo, mais au niveau de chaque plaque rouge (qui sont petites là, parce que j’y ai pas touché depuis un moment) on voit bien la belle inflammation, la morsure de… d’araignée ?

Je sais pas… mais si je le chope…

Et evidemment en belle plante bio que je suis, je n’ai pas de crême anti-ça-gratte et ne veux pas aller en chercher parce que le chimique-pharmaceutique c’est kkbeurk…

Ah, punaise, vivement dans quelques jours !

Nouveau jour

Avant mon déménagement, j’ouvrais mes volets sur une rue passante, pleine de voitures, de coup d’accélération et de bruits de carlingues secouées par un revêtement défoncé. Face à ma fenêtre, de l’autre côté de la rue… un mur, une fenêtre, la chambre des voisins d’en face.

Aujourd’hui, lorsque j’ouvre mes volets je me retrouve nez-à-nez avec des levés de soleil incroyables animés du seul gazouillement des oiseaux.

Je ne le savais pas avant d’arriver là, mais qu’est-ce que ça m’a manqué !

Le jour où j’ai pris ces photos, j’ai failli en tomber par terre tellement c’était beau… je me suis sentie perdre pied, pour de vrai.

Hors cadre

Pascal, c’est l’homme. Muguette, c’est la mule.

Pascal c’est mon agriculteur, fournisseur officiel de mon AMAP. L’agriculture pour lui « c’est surtout pour le plaisir de travailler avec mes chevaux ». Faut dire qu’il les aime ses chevaux. Et puis, ils ont déjà un longue histoire commune.

Avant d’être agriculteur bio, Pascal était dans le spectacle… dresseur de chevaux, magicien, acrobate.

Le spectacle, il a arrêté… mais l’amour du cheval, ça jamais !

Alors, maintenant, Pascal récolte mes petites patates bio avec sa mule… et à l’occasion, la belle retraitée  prend encore la pose devant l’objectif.

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C’est bien Pascal sur cette dernière photo… mais cette fois avec son Bazil, en 2002 ;)