À quel âge devient-on un vieux con ? => 26 ans !
C’est sérieux !
Les élèves concepteurs de jeux vidéos apprennent qu’à 26 ans on bascule : on devient réfractaire à la nouveauté. Du coup, les jeux pour les jeunes doivent innover, innover et innover… alors que les jeux destinés aux adultes doivent s’appuyer sur ce qu’ils ont déjà intégré dans leur petit monde pour avoir une chance de les séduire.
Autrement dit, à 26 ans on devient un vieux con. Un vieux con sympathique parfois, mais un vieux con quand même !
Cette observation purement scientifique… fait de moi une vieille conne. (J’adore !) J’ai quitté l’âge auquel on explore toutes les possibilités pour entrer dans celui de la stabilité. En d’autres termes, je commence à cerner ce que j’aime, ce que je veux, ce en quoi je crois où pas… et seul un cataclysme sera en mesure d’ébranler cette base sur laquelle je vais établir toute ma vie future.
Et, c’est peut-être ça la clef… c’est peut-être à cause de tout ça que chaque mardi soir j’ai le sentiment d’être immergée dans un monde étrange.
Le mardi soir, j’ai chorale. Sur cinquante choristes, nous devons être quatre à ne pas avoir atteint l’âge de la retraite. Et quand j’écoute tous ces vieux (cons depuis bien plus longtemps que moi donc !) discuter des questions d’écologie, de réchauffement climatique et autre, j’ai souvent le sentiment d’avoir été parachutée dans la quatrième dimension.
Pour que vous compreniez bien, il faut que je vous explique dans quel monde je vis au quotidien. Donc, dans mon entourage on dénombre : Dimitri, Élodie, Anne-Marie, Manu, Philippe et Shokoufeh, Sandrine, Cédric, etc. Nous ne sommes pas forcement tous des amis pour la vie, mais nos activités respectives nous amènent à nous croiser souvent.
En un mot, je suis une écolo-maniaque, totalement immergée dans un monde presque exclusivement écolo-maniaque. Autour de moi, c’est juste une évidence. Nous ne sommes pas écolo par choix mais parce que ne pas l’être (au boulot, comme à la maison) serait un contre-sens, un peu comme envisager devenir cannibale.
Voilà, voilà…
Du coup, le mardi soir, le dépaysement est gigantesque : je me retrouve subitement propulsée dans « s’il fallait faire attention à tout ce qu’on nous raconte, on ne ferait plus rien… le bio, je crois que c’est surtout une mode (ça leur passera à tous ces jeunes !)… on ne sait même pas si c’est vrai toutes ces histoires de réchauffement climatique… et ben moi, pour rien au monde je ne retournerai à la vaisselle solide pour les repas de groupe… t’imagines si on devait toujours se trimballer avec sa tasse à café… etc. etc. »
En fait, le mardi soir je me retrouve subitement propulsée au cœur de la génération qui a vu mai 68 de très près. Ces vieux cons (donc !) qui ont construit toute une vie autour des droits de la femme, de la liberté individuelle et du refus des frustrations matérielles. Non dépourvue d’esprit de solidarité, cette génération reste logique jusqu’au bout en aidant les plus démunis à conserver un bien-être minimal (d’où la sécurité sociale, la retraite, le chômage… ).
Le problème, c’est que « tout ce qu’on raconte », toutes « ces nouvelles considérations écolo » introduisent une temporisation de ses valeurs : le bien-être des uns ne doit pas se nourrir de la destruction de la planète ou de la famine des autres (soyons juste cette notion existait déjà… mais aujourd’hui elle explose : de bruit de fond, elle devient maîtresse des lieux).
Tous ces vieux soixante-huitards se sont construits avec une idée très précise des limites qu’ils pouvaient accepter concernant leur liberté individuelle et le taux de frustration auquel ils pouvaient se confronter. Et en bon « + de 26 ans » qu’ils sont, ils sont totalement réfractaires à l’idée que cette limite puisse bouger.
Du coup, quelle que soit leur bonne volonté ou leur conscience des problèmes écologiques, ils se retrouvent coincés entre « les limites qu’ils peuvent décemment accepter » et « tout ce qu’on raconte ». Et, c’est ainsi que les frustrations apparaissent (un peu comme quand ce type est venu expliquer au monde qu’il ne fallait pas tuer le voisin quand on voulait coucher avec sa femme… ). Résultat, de leur point du vue, l’écologie est surtout le casse-couille de service qui vient mettre son nez là où on l’a pas invité, un truc louche qui vient titiller une zone sensible.
Quand je pense à tout ça, je me pose une question : qu’apportera la génération à venir dans ces bagages ? Par quel biais nous mettra-elle - à notre tour - le nez dans notre merde ? Parce que, il ne faut pas croire… il n’y a aucune raison pour que nous soyons une exception. C’est comme ça que le monde marche et évolue, depuis toujours : les jeunes détectent ce qui déconne dans le monde que leur offrent leurs parents… et les vieux rêvent de bâillonner ces jeunes qui remettent en cause les bonnes vieilles valeurs d’antan. Parfois, ces inconscients vont même jusqu’à exiger de leurs vieux qu’ils évoluent un peu…
N’empêche… 26 ans, c’est quand même jeune pour devenir un vieux con !